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Yanick Lahens et l'art de parler des « invisibles »

Ce samedi 6 décembre 2014, la librairie La Pléiade à Bois-Patate a reçu Yanick Lahens pour une causerie précédée de vente-signature de ses derniers livres. Une causerie très enrichissante animée par la professeure de lettres Darline Alexis, entrecoupée de lecture, de passages du roman Bain de lune par Carine Schermann.

Yanick Lahens et Mirlande Manigat (c) Wébert Charles
Yanick Lahens et Mirlande Manigat
(c) Wébert Charles

Midi. Les gens commencent à défiler à la librairie La Pléaide à Bois-Patate, les uns se faisant empaqueter leurs livres, les autres cherchant dans les rayons les dernières parutions de Yanick Lahens. Les deux caissières, de leur côté, sont beaucoup plus occupées que d’habitude. Les gens font la queue, attendant leur tour de payer et de faire signer leurs livres.

L’après-midi s’annonce bien. Les gens sont excités de voir d’aussi  près le récipiendaire du prix Femina 2014 pour sa première intervention en public en Haïti depuis l’annonce du prix. Yanick Lahens, toujours calme, avec la tendresse qu’on reconnaît toujours dans sa voix, répond aux questions de la professeure de littérature Darline Alexis. Pour cette dernière, toute la causerie  tourne autour des thématiques récurrentes dans l’œuvre de Yanick Lahens : de La maison du père à Bain de lune. Cependant, cette communication ne doit pas dispenser les lecteurs de l’envie de lire les livres de Yanick Lahens. Ainsi, il ne faut pas entrer dans les résumés, mais frôler l’histoire racontée dans Bain de lune, particulièrement. Et c’est ce qui s’est passé.

D’entrée de jeu, Yanick Lahens a tenu à se situer. Se situer par rapport à son métier (l’écriture), à son sexe et à son espace (Haïti). Pour elle, c’est important de le signaler, car comme l’a écrit Jean-Paul Sartre, l’écrivain écrit en situation, il est toujours en situation. « Les gens me demandent souvent -où habitez-vous ?- je dis que j’habite là où habite la majorité des Haïtiens : en Haïti », martèle l’auteure de « Guillaume et Nathalie ».

Le paysan et les invisibles

Interrogée sur le silence du paysan par Darline Alexis, Yanick Lahens avance que c’est une chose universelle, propre aux paysans, non pas uniquement aux paysans haïtiens, car le paysan est « une manière d’être par rapport à la terre, par rapport aux éléments », ils sont toujours en relation avec l’invisible, le sacré. Que ce soit dans les romans américains du début du XXe siècle qui parlent des fermiers ou le livre de Jean-Marie Déguignet, « Mémoires d’un paysan bas-breton », voire même les romans de Jacques Roumain, Jean Baptiste Cinéas et Edris Saint-Amand on n’est pas loin de cet univers. « Le problème, c’est que depuis 50 ou 60 ans, on a oublié que cette question essentielle [la paysannerie] était universelle. »

Carine Schermann lisant un extrait de Bain de lune. (c) Wébert Charles
Carine Schermann lisant un extrait de Bain de lune.
(c) Wébert Charles

Yanick Lahens a également évoqué la littérature ou le roman comme espace de complexité par excellence. « Quand on est dans le roman, on est dans un autre univers, différent de la politique », selon elle. Tout l’après-midi a été rythmé par la lecture d’extraits de « Bain de lune » par Carine Schermann, d’une voix douce, qui vous plonge dans cet univers où se bousculent rêve et réalité.

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Auteur·e

cwebbn

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